lundi 16 novembre 2009

La Vilaine ne fera pas de vieux os....


La vieillesse me dérange parce que derrière les rides et les déambulateurs, j’entrevois ma propre décrépitude. Le troisième âge est-il autre chose qu’un long préambule à la Mort?
Tout commence avec la réception à domicile du colis « vieille peau » soit LA PERTE dans toute sa splendeur. Perte de la mémoire, des cheveux, des dents, de la vue, des sphincters. Nous perdons tout pour gagner gros : un one to one avec la Dame faucheuse. Cette perspective ne me remplit pas de joie. Lorsque j’allais chez mes grands-parents, je considérais les numéros chapliniens de Papy Gaston et Mémé Josette comme une sorte d’avertissement. Une petite voix perverse me susurrait : « Voilà ce qui t’attend ma grande! ». A présent, j’approche de l’âge christique (ce qui n’est pas bon signe) et je dois me préparer à la lutte! Si vous aviez vu Papy Gaston confondre Mémé avec Youki, le Pékinois de la famille (erreur facile puisque tous deux avaient une hanche en plastique), vous auriez été tout comme moi saisis par l’effroi! Je pense également à cette fameuse nuit pendant laquelle l’infortunée Josette fut quasiment étranglée par Gaston qui se croyait en temps de guerre. Son rêve lui fit confondre Mémé avec une « saleté de Bosch »… Heureusement, Youki est intervenu mais la famille n’en demeura pas moins choquée.
Nostalgie quand tu nous tiens… Je me rappelle le charme désuet de mon grand-père. Les éclaboussures, ah les éclaboussures! Divers et variés, les embruns étaient quotidiens : soupe, rouge, café, croûtes de fromage. La vieillesse rend parfois généreux. Un exemple? Les effluves corporelles. Nous le savons, l’hygiène et le troisième âge ne font pas bon ménage. Ce gros souci de pollution olfactive embarrasse plus d’un enfant. Je parle de ce tendre moment, celui où nos mères nous poussent à recevoir la bise mouillée de Pépé/ Mémé avant de se coucher. Que de malaises et d’asphyxies! Les Vieux sont de sérieux concurrents de la 3D. Avec eux, nous en avons plein la vue, le nez et les oreilles!! Surtout les oreilles car nos amis fripés ont un besoin gigantesque de communiquer. Certains attribueront ce phénomène à la solitude dont ils souffrent; en ce qui me concerne, je n’y vois qu’une envie sévère de nous « les briser menu menu ». Absolument! Juste pour se venger parce que nous leur présentons un visage aussi lisse que les fesses d’un bébé, une taille marquée, des muscles actifs, une joie de vivre inébranlable et une dentition qui n’est pas amovible! Voici un exemple de vengeance caractéristique : Mémé Josette a tenté de m’assassiner lorsque je n’étais qu’une vulnérable petite fille. N’ayant pas chaussé sa paire de « culs de bouteilles », Mémé m’a administré le vermifuge du chien au lieu de mon sirop pour la toux. J’ai survécu il est vrai, mais pendant des mois j’ai subi de légers problèmes gastriques. Étourderie ? Représailles ?
Non contents de se ratatiner comme une vieille pomme, ils décident alors de nous rendre fous. La technique qui marche à tous les coups semble consister à feindre la démence en rabâchant. J’ai pu ainsi écouter 562 fois les combats en Indochine, la capture du soldat Pichon, les descriptions plus que parlantes des Asiatiques dont Papy placardait les murs de sa cave. Comment oublier les récits terrifiants de luttes ? Les corps à corps sanguinaires, les tranchées... Petite fille, j’en frissonnais. Bien plus tard, j’ai compris que Gaston était comptable dans l’armée et qu’il n’avait pas dû voir un cm² de champ de bataille. Son implication au sein de l’armée se limitait à faire des calculs et classer dangereusement des dossiers, nous sommes loin de « Good Morning Vietnam » ! Les Mémés sont davantage ancrées dans la vie quotidienne. Rejoignant Françoise Hardy et son amie la rose, elles serinent des anecdotes, puis, gémissent en évoquant leur jeunesse perdue. La vie pendant la guerre, les rations de pains, les oranges à Noel alors que, NOUS les jeunes nous ne sommes jamais satisfaits! Cela sonne t-il familièrement à vos écoutilles amis lecteurs ? Les peintures exaltées d’un temps passé sont rapidement devenues la plaie de mes séjours dans la maison familiale.
S’il n’y avait que ça ! Comment excuser le comportement parfois abusif des personnes âgées ? LV songe à toutes ces fois où elle a dû laisser sa place à une petite veille qui la fixait d’un regard de cocker ou, au contraire, toutes les autres fois où ayant devancé la requête, Mamy musette l’a accablé « parce qu’elle peut encore tenir debout » !! L’incohérence est souveraine dans les maisons de retraites. LV est révoltée contre ces gens qui jouissent de 100% de leur temps libre et qui hantent nos magasins aux heures de pointes. Dans les supermarchés, Mamy traîne ses jambes fluettes vers 18h00 lorsque la foule des travailleurs exténuée doit s’y rendre. Trente minutes dans chaque rayon. A petits pas. A la caisse, Lucienne classe ses courses par ordre thématique et accomplit avec talent une délicate bouclette à CHAQUE sac. Pressé, usé, vous devrez attendre Lucienne. Sans être insultant ni violent. A la gare, vous courrez tel un évadé, vous n’avez que vingt minutes pour acheter votre billet et vous ruer sur le quai. Non; navrée de vous le dire mais vous manquerez ce train. En effet, Jeannine 82 ans a décidé elle aussi de se déplacer pour acheter ses billets. Une véritable urgence puisqu’elle part voir sa fille dans six mois. Le temps que l’employé lui explique que les trois changements sont inscrits sur le billet, le temps que Jeannine lui demande « des petites étiquettes charmantes pour mettre sur les bagages », qu’elle conte l’ensemble de sa vie (avec les détails), le train est parti depuis quinze minutes. Il est vrai que ces cas sont plutôt citadins, les débris provinciaux peuvent se laisser aller. En ville, l’ancêtre devient un cauchemar. Le pire concerne le halo d’immunité qui enveloppe ces jolies têtes grises. L’âge attribue une protection mystérieuse. Un vieux vous tutoie ? C’est normal. Vous rudoie ? Normal aussi! Les vieux bêtes et méchants existent et je trouve scandaleux de devoir encaisser sans broncher leur salve de reproches parce que dans une société judéo-chrétienne, le respect des rides est sacré.
Garez vos déambulateurs, planquez vos sondes à pipi parce que LV n’hésitera pas une seconde à shooter dans vois béquilles si nécessaire. Je rêve d’une société où la jeunesse serait justement considérée et respectée.
LV

1 commentaire:

  1. Cela m'a fait penser à l'un de mes anciens textes. Que voici :

    Vous n'allez pas le croire, mais il m'est encore arrivé un truc de ouf ce matin. Le plus ouf, c'est que le matin semble très actif chez moi. Alors que je suis la personne la plus mal réveillée que je connaisse. Une vraie ptite sauvage qui mord.
    Je devais me faire faire une prise de sang, qui soi-dit en passant, n'est que la deuxième en une semaine. Pourquoi ? Eh bien parce que la première, c'était pour un bilan gynécologique, la deuxième, pour un traitement dermatologique. Et bien sûr, la dernière sucée doit remonter à maximum deux jours ! Damned !
    Donc, je suis allée me faire piquouzer. Et que vois-je à 50 m devant moi, devant l'entrée du laboratoire ? Une file indienne de vieux !!! Tout un tas de coiffes blanches qui déborde sur le trottoir et qui embouteille le passage. Rhaaaa !!!
    C'est pas vrai ! J'hésite un instant : je file au taf ou je fais la queue ? Parce que j'ai quand même sauté le petit-déjeuner moi monsieur. Eh oui. Et ça, ça compte. Je ne ferai pas subir cette abomination une seconde fois à mon rituel matinal. Hop, je prends mon ticket.
    Alors en fait, c'est la faute à l'ordinateur. Oui, c'est mes deux voisines de derrière qui expliquent ça à l'assemblée. Avant, l'enregistrement des dossiers était manuel, alors forcément, ça allait plus vite. S'il fallait effacer une bêtise, on y mettait un coup de tipex et puis voilà. Pas de soucis ma bonne dame. Tandis que maintenant… Quand il faut revenir en arrière, on est obligé de faire tout un tas de manipulations ! Pfff… Ah, la technologie. Ben non, c'est pas de sa faute à cette pauvre fille. C'est parce qu'elle est obligée de tout rentrer sur l'ordinateur. C'est tout nouveau.
    Ah bah ouais. Ce doit être ça.
    Mais dites-donc, il serait pas 8h55 là ? Ah si… mais, redites-moi… vous ne travaillez pas, oups, plus ? (Non, je ne suis pas cynique, juste réaliste). Alors pourquoi faut-il que vous vous pointiez tous entre 8 et 9 ? Ça ne pouvait pas attendre 10 ? Hein ?
    C'est un complot ? Vous avez vu les 3 péquenots débarquer pour leur petite piquouze hebdomadaire et, ensemble, par talkies walkies, vous êtes mis en marche ? Mais qu'est-ce que c'est ?
    Le pire, c'est que je ferai certainement partie du crew un jour moi aussi. Et j'emmerderai les ptits cons, en plus, j'exigerai d'eux qu'ils me laissent passer. Car finalement, tout ça, ce n'est qu'une question de priorité.

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